Aujourd’hui 26 juillet, les Etats-Unis célèbrent le 69eme anniversaire de l’abolition de la ségrégation raciale dans leurs armées. On peut s’étonner d’une décision si tardive. Ce n’est que l’un des multiples exemples d’un traumatisme à l’origine même du pays : l’esclavagisme. L’actualité se fait l’écho constant de ce débat toujours à fleur de peau et jamais vraiment tranché malgré les décrets et les transformations graduelles de la société.
Lorsque HBO a annoncé s’emparer de ce sujet, les interrogations n’ont pas manqué de fuser. Le réseau américain est généralement reconnu pour la qualité de ses séries d'inspiration historique (Rome, Deadwood, Band of Brothers, The Pacific). D’autres ont réussi à séduire avec des séries uchroniques comme The Man in the High Castle d’Amazon Video, imaginant un monde où l’axe germano-nippon aurait gagné la seconde guerre mondiale. Le synopsis présentant leur projet a soulevé des interrogations. La série décrirait « les évènements hypothétiques conduisant à la 3eme guerre civile américaine ». Elle suivrait « les personnages des deux côtés de la zone démilitarisée de Mason-Dixon y compris des combattants pour la liberté, les chasseurs d’esclaves, des politiciens, des abolitionnistes, des journalistes, des exécutifs de conglomérats esclavagistes et les familles de gens dans leur thrall ». Le titre de la série sera Confederate.
Quelques clarifications : entre 1861 et 1865, les confédérés d'Amérique regroupaient les états ayant fait sécession avec les Etats-Unis pour s’opposer à la réforme de l’esclavage voulue par Abraham Lincoln. Défaits militairement, ils ont été graduellement réintégrés dans les Etats-Unis. Par ailleurs, la ligne Mason-Dixon a été la ligne de démarcations entre les états confédérés du sud et les états abolitionnistes du nord. Elle est encore aujourd’hui la frontière entre la Pennsylvanie et le Maryland. De plus, le terme de « thrall » (dans l'annonce de HBO) est généralement associé à l’esclavagisme dans les cultures scandinaves vikings : probablement une façon de se distancer de la réalité historique américaine qui froisse tant.
Les Immaculés de Game of Thrones : esclaves libérés mais qui servent toujours aveuglément une reine
Peine perdue : HBO a annoncé que Daniel B. Weiss et David Benioff écriraient le scénario de la série. Auréolés par le succès de Game of Thrones dont ils sont scénaristes et producteurs, leur sélection a fait grincer des dents. Leur représentation de l’esclavagisme (les Immaculés notamment), la violence et l’omniprésence gratuite de viols font douter de leur capacité à aborder avec tact un sujet délicat, fût-il dans une narration dystopique. Pas une ligne de scénario n’a pour l’instant été publiée et pourtant, voilà HBO prévenu de l’ampleur des difficultés auxquelles il va devoir faire face.
Ses réponses ont pour l’instant été décevantes : Confederate serait en discussion depuis des années et, sous-entendu, traité sérieusement. Malcolm Spellman (Empire) et Nichelle D. Tramble (Justified, The Good Wife) seront aussi associés au projet et sont… afro-américains. La caution morale du scénario de la série serait donc assurée. Cependant, HBO a refusé que Weiss et Benioff donnent des interviews pour clarifier leurs intentions. Résultat : un débat toujours aussi peu lisible comme ce tweet de David Harewood, acteur afro-américain de Supergirl, The Night Manager, Homeland, Blood Diamond :
Good luck finding black actors for this project. https://t.co/ruHGTVkesK
— David Harewood (@DavidHarewood) 19 July 2017