Un quart de la saison 2016-17 s’est déjà écoulé. Ceux qui pensent qu’elle se résumera à un troisième duel en final entre les Cavaliers de Cleveland et les Golden States Warriors n’ont pas forcément tort. Et pourtant, elle est loin de lasser les amateurs de basketball. Les performances s’enchainent et les compteurs s’affolent : nombre de points par match, nombre de tirs à trois points, les moyennes hors norme de certains joueurs... A défaut d’influencer la conclusion de la saison, certaines performances collectives et individuelles étonnent. Faisons donc un tour d’horizon de la NBA.
Les scores des équipes
Draymond Green peut danser (en évitant les coups de pied...), son équipe marque 118,1 points par match
On ne s’ennuie pas en regardant les matchs de basketball nord-américain. Que de points marqués. Il fut un temps où la défense pouvait constituer la marque de fabrique d’un champion. On pense notamment aux Golden States Warriors qui disposaient de la meilleure défense du championnat en plus de l’une des meilleures attaques lors de leur campagne victorieuse en 2013-14. Dorénavant, marquer 100 points est à la mode. On pourrait même dire que laisser à son adversaire 100 points est rentré dans les mœurs, à condition d’en marquer soi-même 120. Voici quelques exemples de scores récents, sans temps supplémentaires pour la plupart : Celtics – Cavaliers 128-122 (4 novembre), Pacers – Trail Blazers 109-131 (30 octobre), Rocket - Warriors 132-127 (1 décembre), Pacers - Warriors 106-142 (5 décembre), Magic – Wizards 124-116 (6 décembre), Lakers – Rockets 95-134 (7 décembre), Timberwolves – Raptors 110-124 (8 décembre), Nets – Spurs 101-130 (10 décembre)…
Le responsable de cette inflation ? L’époque : d’une part, les médias associent plus volontiers les substantifs « stars » et « superstars » aux meilleurs marqueurs. D’autre part, si Magic Johnsson ou Penny Hardaway étaient des joueurs polyvalents et rares durant les décennies passées, le prototype du joueur moderne sait tout faire, y compris tirer à trois points. Il suffit de voir l’évolution des postes d’avant (ailier fort et pivot), traditionnellement au rebond ou au contre, pour s’en convaincre. Quant aux arrières et surtout les meneurs, les meilleurs n’hésitent pas à marquer 20 points par match. Finie l’époque de John Stockton, meneur historique des Utah Jazz, avec 13,1 points et 10,5 passes décisives par match durant l’ensemble de sa carrière.
Les doubles
Russell Westbrook (source: Maddie Meyer/Getty Images)
Dans les années 70, Oscar Robertson était parvenu à marquer à la fois plus de 30 points, délivrer plus de 10 passes décisives et prendre plus de 10 rebonds durant la saison 1961-62. On croyait ce genre de records éternels. Et pourtant, Russell Westbrook, leader des Oklahoma City Thunders, est en passe de faire mieux. A ce jour, il réalise 30,9 pts, 10,8 rebonds et 11,3 passes décisives. En outre, il le fait en 35,7min de jeu et non pas 44,3min comme Robertson. Des statistiques incroyables. Elu « joueur du mois » dans la conférence est en octobre, il est un solide prétendant au titre de « Most Valuable Player » sur la saison complète d’autant que son équipe est 6eme de la conférence ouest.
La décision de Mike D'Antoni de faire de James Harden un meneur de jeu a été la bonne. Redouté pour son jeu en isolation et ses eurosteps pénétrants, il l’est désormais aussi pour ses passes ciblées aux métronomes des Houston Rockets, campés derrière la ligne des trois points. Alors que les défenses adverses convergent sur Harden, Ryan Andersson, Trevor Ariza et Eric Gordon disposent de l’espace nécessaire pour peaufiner leur moyenne collective de 40%. Résultat : Harden marque 27,8 points par match accompagnés de 11,6 pages décisives. 5,7 ballons perdus également : un autre sujet pour un autre article.
James Harden, "the beard", prétendant au titre de MVP (source: ESPN.com)
Ces deux joueurs, Westbrook et Harden, comptent le plus de double-doubles et triple-doubles à ce stade de la saison : 19 et 12 (dont 7 d’affilé, égalant le record de Michael Jordan) pour le premier, 17 et 4 pour le second. Mais un autre joueur mérite aussi d’être mentionné : Lebron « The King » James. Il comptabilise 11 double-doubles et 3 triple-doubles. Aussi et surtout, pour la première fois de sa carrière, il ne sera probablement plus le meilleur marqueur de son équipe (Kyrie Irving l’était encore avant les 44 points du King face aux Hornet le 10 décembre) mais distribue plus de passes décisives que jamais (9,1 par match) tout en prenant 7,7 rebonds. Voici là un parfait exemple de joueur dont le style évolue durant sa carrière mais aussi entre la saison régulière et les playoffs (plus de points et rebonds, moins de passes).
Le tir à trois points
A l’exception notable des San Antonio Spurs, les équipes en tête du championnat bombardent le panier adverse depuis la ligne des trois points. Non pas que Kawhi Leonard, Danny Green et Patty Mills ne soient pas de bons tireurs, au contraire, mais la stratégie de l’équipe repose sur un usage parcimonieux de cette arme. Elle s’appuie surtout sur de grands avants et sur un jeu dos au panier, près la raquette. Ils font par contre de leur spécialité la défense de la ligne des trois points n’offrant à leurs adversaires que 24,3 tentatives (6eme du championnat) et 33,9% de réussite (8eme).
Le 14 novembre, les Houston Rockets n’en ont eu cure face aux Spurs. Malgré une défaite 107-100, ils ont tenté un nombre record de tirs à trois points : 47 paniers avec 15 connexions seulement. Depuis ce début de saison, l’équipe tente en moyenne 37,2 tirs à longue distance match à ce jour avec un taux de réussite de 37,7%. Un record.
Quant aux prétendants les plus légitimes au titre de champions 2017, ils ne surprendront personne : le tir à trois points est l'un des atouts majeurs de leur arsenal. Les Cavaliers sont les plus en verve avec 40,1% de réussite (1ere position) pour 33,8 tentatives (3eme position) : 9,5 de plus que leur concurrent principal à l’est du championnat, les Toronto Raptors. Golden States n’est évidemment pas en reste avec 37,8% de réussite et 31,5 tentatives (4eme position dans les deux catégories). D’ailleurs, à ce stade, on pourrait presque imaginer voir trois joueurs de cette équipe, Stephen Curry, Klay Thompson et Kevin Durant, participer au concours à trois points du All-Stars Game de 2017.
Klay Thompson: 60 points en... 29min (source: ESPN.com)
Connu pour être un joueur précis et aussi un défenseur efficace, Klay Thompson a marqué 60 points contre les Pacers le 6 décembre. Sans surprise, 8 de ses 21 paniers réussis ont été marqués au-delà de la ligne des trois points. Ce qui rend cette performance remarquable est qu’elle a été réalisée en 29min de jeu et seulement 11 dribbles. Klay Thompson est assurément l’expert de la ligue au « catch & shoot » à la sortie d’écrans ou sur des « cutters » sous le panier.
DeMar DeRozan des Raptors de Toronto
Une mention spéciale pour DeMar DeRozan : son début de saison a été incroyable notamment parce qu’il a été capable de marquer 40, 32 puis 33 points sur les trois premiers matchs de la saison sans une seule tentative à trois points. Depuis, si on considère ses dix derniers matchs (21 novembre – 12 décembre), on ne compte que 15 tentatives. Son équipe est pourtant bien installée en 2eme position de la conférence est, dans le sillage de Cleveland. Si le tir à trois points domine, l’art du shoot à mi-distance n’est donc pas mort, rassurons-nous.
Toujours plus de surnoms à retenir
Sans préjugés aucun, on constate que les américains apprécient les noms courts. Trois syllabes et un surnom s’impose. Pour le néophyte, cette pratique rend obscures les articles, vidéos, émissions dédiés à la NBA. Malheureusement pour certains, et heureusement pour la plupart, la liste de joueurs remarquables afflués d’un diminutif s’allonge alors que de jeunes pousses donnent le ton du futur de la ligue nord-américaine :
Lebron James (Cavaliers) face à Jimmy Butler (Bulls)
- LBJ : facile, « The King » Lebron James. Il est plus que jamais le patron de Cleveland, le plus grand joueur du championnat, un joueur exceptionnel désormais 9eme marqueur de l’histoire de la NBA. Et ce n’est certainement pas fini: il est hier le premier joueur de l'histoire de la NBA à cumuler 27000 points, 7000 rebonds et 7000 passes décisifs,
- KD : simple à retenir, Kevin Durant. Son arrivée chez les Golden States Warriors a fait couler beaucoup d’encres et vociférer plus d’un fan d’Oklahoma City, son équipe précédente. Les statistiques qu’il affiche devraient le réconcilier avec les amateurs du beau jeu tant son efficacité est impressionnante pour un ailier : 7eme meilleur marqueur avec 26 points par match mais surtout 54,9% de réussite, soit 3,9 points de pourcentage de plus que lors de sa meilleure saison passée; à cela s’ajoutent ses meilleures moyennes par match au rebond (8,4), contres (1,7), interceptions (1,4) et ballons perdus (2,2 seulement),
Anthony Davis (source: Kyle Terada-USA TODAY Sports)
- AD : plus dur, Anthony Davis. Que dire ce jeune joueur, souvent blessé et qui a enfin l’opportunité de montrer tout l’étendue de son talent. Ses moyennes par match sont affolantes : 31,4 points (1er), 2,8 contres (1er), 11,4 rebonds (7eme). Il se montre même plus agressif en attaque avec 10,5 lancers francs tentés contre 6,3 durant sa carrière. Il s’essaie aussi à trois points avec une réussite médiocre mais perfectible de 26%. Quel gâchis que son équipe traine en bas de classement de la conférence ouest avec seulement 7 victoires pour 17 défaites,
- KAT : toujours plus compliqué, Karl Anthony Town. Rookie de la saison 2015-16, KAT sait tout faire et peu de joueurs ont un tel potentiel. Il sait jouer dos au panier des deux côtés. Sa mobilité est excellente, il court plus vite que beaucoup arrières même si il semble souvent perdre son équilibre. Son shoot rappelle celui de Tim Duncan mais il est émotionnel comme l’était Kevin Garnett. Résultat : 21,4 points par match, 10,4 rebonds et à 21 ans, l’avenir devant lui,
- KP : dur, sauf si vous êtes fan des New York Knicks, Kristaps Porzingis. Le letton de 2,20m est l’une des raisons principales pour laquelle son équipe est en 5eme position de la conférence est (l'autre étant la conférence est elle-même, plus faible que celle de l'ouest). Comme KAT, KP joue sa seconde saison de NBA mais leur style est l’inverse l’un de l’autre. Filiforme et calme, KP joue de l’extérieur de la ligne de trois points (36,9% de réussite) et n’hésite pas à dribbler pour pénétrer l’axe du panier ou le long de la ligne de fond. Si seulement son équipe pouvait se concentrer sur son développement plus que sur les propos incohérents de son président, Phil Jackson…
Giannis Antetokounmpo, il sait tout faire (source: ESPN.com)
- The Greek Freak : un vrai challenge, Giannis Antetokounmpo. Pourquoi un tel surnom ? Parce que le joueur de Milwaukee Bucks est grec et qu’il fait partie de ces joueurs d’exception à pouvoir prendre les cinq positions sur le terrain. Imaginez un meneur de 2,10m… Chose incroyable, à 22 ans, il est déjà dans le Top 10 de la NBA aux contres et interceptions,
- The Process : si vous ne regardez pas les fonds de classement, difficile de reconnaitre Joël Embiid, le camerounais des Sixers de Philadephie. Bien que limité à 20min par match, le rookie étonne par sa polyvalence et aussi sa force. Dos au panier, il deviendra vite inarrêtable à supposer qu’il contrôle mieux ses coups de boutoirs dans le pivot adverse et tienne mieux son ballon, trop souvent perdu. 2016 oblige, il tire aussi à trois points et remarquablement bien, avec 44,2% de réussite à ce jour.
5-18
Harrison Barnes, gros contrat, petits résultats (Source: Jerome Miron-USA TODAY Sports)
Plus d’une équipe a déçu en ce début de saison. On pourrait citer les Portland Trailblazers (12 victoires, 13 défaites), les Pacers d’Indiana (12 victoires, 12 défaites), les Minnesota Timberwolves (talentueuse, bien coachée et seulement 6 victoires, 17 défaites). Les Dallas Mavericks emportent pourtant la palme de la médiocrité. Alors que son équipe de football américain, les Cowboys, domine le championnat de NFL, Dallas traine en bas du tableau de la NBA. Enfin le joueur le mieux payée de son équipe, la star allemande de l’équipe Dirk Nowitzki est blessée et voit son équipe se faire étriller depuis le banc. Wesley Matthews patine. Seth Curry est vif comme l'éclair mais loin d'avoir le talent de son frère, Stephen (double MVP 2014-15, 2015-16). Recruté à prix d’or des Golden States Warriors, Harrison Barnes remplit correctement la feuille de match mais ne parvient pas encore à faire la différence.
Dans un article passionnant, ESPN a levé le voile sur la relation étrangement proche entre le propriétaire de l’équipe Marc Cuban et l’allier Chandler Parsons (finalement transféré vers Memphis cette saison). Durant les deux dernières années, son degré d’influence, notamment sur le recrutement d’autres joueurs, nous fait douter du pouvoir réel de Rick Carlisle, champion en 2011 et l’un des meilleurs coaches de la ligue. Du grand gâchis qui pourrait réduire les Mavericks à l’anonymat à laquelle l'équipe fut réduite durant les années 90.
Image d'entête, source: Sue Ogrocki